Imágenes de páginas
PDF
EPUB

& les Algonquins à prendre les armes, & leur prester main forte, se promettant que nos François feroient de la partie, comme contre vn commun ennemy; Mais ny les Hurons ny les Algonquins n'y ont point voulu entendre, & ont refufé leurs prefens; les Biffiriniens n'y ont non plus voulu entendre à caufe des extortions qu'ils fouffrent defdits Sauuages de l'Isle en defcendant à la traitte; Pour les Hurons, ils ont couuert leurs refus de l'apprehension d'vne armée dont on les menaçoit en bref. Mais en effet ç'a esté pour ce que la Nation des Ours qui fait la moitié des Hurons, s'eft piquée de ce que les Sauuages de l'Isle ne les inuitoient point comme les autres, ne leur faisants point part de leurs prefens, au contraire defendant qu'on ne leur en parlaft.

Cependant d'vn autre cofté nous apprehendons que ce ne foient tous ftratagémes de Satan pour empefcher la conuerfion de ces Peuples, car ceux de l'Isle se voyans [53] éconduits s'en font retournez fort mefcontes tant des Hurons, que des Biffiriniens, & ont menacé qu'ils ne lairroient [sc. laiffoient] paffer ny les vns, les autres pour aller aux François.

ny

Le Borgne de l'Ifle difoit aux Hurons en nostre presence, pour recommander le fuiet de fon Ambaffade, que fon corps eftoit des haches, il vouloit dire, que la conferuation de sa perfonne, & de sa Nation, eftoit la conferuation des haches, des chaudieres, & de toute la traitte des François pour les Hurons; mefmes on dit, foit vray, foit faux, qu'il s'eft vanté qu'il eftoit maistre des François, & qu'il nous remeneroit à Kébec, & nous feroit repaffer la mer à tous; ie dis qu'on le dit, & qu'on luy attribue ces rodomontades, car nous ne les auons pas ouyes, au contraire

.

mon enemy; but neither the Hurons nor the Algonquins have been willing to listen to them, and have refused their presents. The Bissiriniens likewise have refused to listen to them, on account of the extortion practiced on them by the Island Savages in going down for trade. As to the Hurons, they have covered their refusal with the apprehension they have of an army with which they were lately threatened. But the real cause was in fact that the Nation of the Bear, which constitutes the half of the Hurons, was piqued because the Island Savages did not invite them as well as the others,- offering them no presents, and on the contrary forbidding that they should be told of the matter.

Meanwhile, on the other hand, we are afraid that these are all stratagems of Satan to hinder the conversion of these Peoples; for the men of the Isle, seeing themselves [53] refused, have returned very much discontented at the Hurons as well as at the Bissiriniens, and have threatened that they would let neither of them pass down to the French.

Le Borgne [the One-eyed] of the Isle said to the Hurons, in our presence, in order to recommend the subject of his Embassy, that his body was hatchets; he meant that the preservation of his person and of his Nation was the preservation of the hatchets, the kettles, and all the trade of the French, for the Hurons. They even say, whether true or false, that he has boasted that he is master of the French, and that he would lead us back to Kébec and make us all recross the sea. I am telling what is said, and the boasts attributed to him, for we did not hear them; on

the contrary, they went away, so far as we are con

ils se departirent d'auec nous auec toute forte de fatisfaction & de contentement.

Ils nous firent à la verité vn grand discours comme d'amis, qui tendoit, ou à nous faire quitter tout à fait le Pays des Hurons, ou au moins la Nation des Ours, comme la plus mefchante de toutes, qui auoit massacré Eftienne Bruflé, & le bon Pere Nicolas Recolet auec fon compagnon; [54] & qui pour vn coup leur auoit autrefois affommé huict de leurs hommes; Et pour moy en particulier, en me flattant & me loüant, ils me dirent, que plutoft que de rifquer ma vie parmy vne Nation fi perfide, ils me confeilloient de defcendre à Kébec, au moins apres auoir paffé icy encor vn an, pour fçauoir parfaictement la langue, que ie ferois vn grand Capitaine, & qu'il n'y auroit que moy qui parleroit dans les confeils; C'est ainfi que ces braues confeillers nous donnoient des aduis, auec plufieurs & long difcours, pour monstrer l'amitié qu'ils auoient toufiours portée aux François par deffus toutes les Nations. Nous leur refpondifmes que nous n'eftios pas venus en ces Pays pour feruir de truchement, ny fous esperance de nous y enrichir, ou de deuenir vn iour grands Capitaines; mais que nous auions abandonné nos parens, nos moyens, & toutes nos poffeffions, & auions trauerfé la mer afin de leur venir enseigner la voye de falut, au peril de nos vies; qu'au refte nous tafchions, & que nous tafcherions de fi bien nous cõporter, que les autres Nations auroient plus de fuiet de nous aymer, que de nous mal-faire. Bref nous leur difmes qu'vn iour [55] quelqu'vn des noftres pourroit demeurer en leur Pays pour les inftruire, & qu'il y en auroit defia n'eftoit leur vie errante; Ils tefmoignerent en estre fort contens, &

cerned, with every appearance of satisfaction and

contentment.

They had, in fact, a long and friendly talk with us, with the object in view of making us entirely leave the Country of the Hurons or at least the Nation of the Bear, as the most wicked of all the tribes, since it had murdered Estienne Bruslé and good Father Nicolas, the Recolet, with his companion; [54] and had some time before, for a blow, slain eight of their men. To me in particular, in the way of flattery and praise, they said that, rather than risk my life among a Nation so perfidious, they would advise me to go down to Kébec, at least after having passed another year here to learn the language perfectly; and that I would be a great Captain, and the only one who could speak in their councils. Thus these brave counsellors gave us advice, with many and long speeches, to show the friendship they had always had for the French above all Nations. We re

plied that we had not come into this Country to act as interpreters, nor in the hope of getting riches, nor yet in the hope of becoming one day great Captains; but that we had left behind our parents, our means, and all our possessions, and had crossed the sea in order to come to teach them the way of salvation, at the peril of our lives; that, for the rest, we were trying and would try so to comport ourselves that other Nations would have more reason to love us than to do us harm. In short, we told them that one day [55] some of our Fathers might stay in their Country, to instruct them; and that they would have had them before this, had it not been for their wandering life. They declared that they were well

acquiefcerent à nos raisons: pour comble defquelles nous leur donnasmes vn Canot, auec quelques autres petits prefens, dont ils demeurerent tres-fatisfaits, difans qu'ils eftoient defia de retour en leur Pays, & firent mille remerciemens auec forces promeffes de bien traitter les noftres quand ils pafferont fur leurs terres. Nous tafchons de nous concilier l'amitié de tous ces Peuples afin de les conquefter à Dieu.

La Semaine Saincte Louys de faincte Foy nous vint visiter, & fit ses Pasques auec nous pour se disposer à aller à la guerre auec vn fien oncle contre les Iroquois; il n'est pas encor de retour; on nous veut faire accroire qu'il est descendu à Kébec; ie m'en rapporte.

Le quatorziefme d'Auril le fils du Capitaine Aenons apres auoir perdu au ieu de pailles vne robe de Caftor, & vn collier de quatre cens grains de Pourcelaine, eut vne telle apprehenfion de fes parens, que n'ofant entrer dans la Cabane, il se desespera, & se pendit à vn arbre. C'eftoit vn efprit [56] fort melancholique; dés cet Hyuer il auoit esté desia sur le point de se défaire foy-mefme, mais vne petite fille le prit fur le fait: comme on luy demandoit qui l'auoit porté à ceste mefchante refolution, Ie ne fçay, dit-il, mais il me femble que i'ay quelqu'vn dedans moy qui me dit continuellement, pends toy, pends toy. Le ieu ne porte iamais à rien de bon; en effet les Sauuages mefmes remarquent que c'eft quafi l'vnique caufe des batteries & des meurtres.

Le huictiefme de May, estant allé à la Rochelle, vne femme qui venoit d'accoucher, me presenta fon petit enfant à baptifer; comme il fe portoit bien, & que noftre couftume eft, finon en cas de neceffité de

« AnteriorContinuar »