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Des Caps de S. Louys et de Mommorency, et de quelques autres terres, et comme vne de nos barques ayant heurté a vn escueil, ne laissa de passer outre.

LE Lundy xxvij. au soleil couchant allasmes le long de ceste terre qui est comme nous avons dit situee au Suest et Norouest iusques au Mercredy, auquel iour vismes vn autre Cap où la terre commence a se tourner vers l'Est, et allasmes le long d'icelle quelques xvi. lieuës, et de là ceste terre commence a tourner vers le Nord, et a trois lieuës de ce Cap y a fond de xxiiij. brasses à plomb. Ces terres sont plates, et les plus descouuertes de bois que nous ayons encores peu voir, il y a de belles prairies et campagnes tres-vertes. Ce Cap fut nommé de S. Louys, pource qu'en ce iour l'on celebroit sa feste, et est au xlix. degré et demy de latitude et de longitude Le Mercredy matin, nous estions vers l'Est de ce Cap, et allasmes vers Norouest pour approcher de ceste terre, estant presque nuict, et trouuasmes

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qu'elle regardoit le Nord et le Su. Depuis ce Cap de S. Louys iusques à vn autre nommé le Cap de Mommorency y a quelque xv. lieuës, la terre commence à tourner vers Norouest. Nous voulusmes sonder le fond a trois lieuës pres de ce Cap: mais nous ne le peusmes trouuer auec cent cinquante brasses, et pource allasmes le long de ceste terre enuiron dix lieuës iusques à la latitude de cinquante degré. Le Samedy ensuyuant premier iour d'Aoust au leuer du soleil cognusmes et vismes d'autres terres qui nous restoyent du costé du Nord et Nordest, lesquelles estoyent treshautes et coupees, et sembloyent estre montagnes, entre lesquelles y auoit d'autres terres basses ayans bois et rivieres. Nous passasmes autour de ces terres tant d'vn costé que d'autres tirans vers Norouest, pour voir s'il y auoit quelque golfe ou bien quelque passage iusques au v. du mois. D'vne terre à l'autre il y a viron xv. lieuës, et le mitan est au cinquante et vn tiers degré de latitude, et nous fut tresdifficile de pouuoir faire plus de cinq lieuës à cause de la maree qui nous estoit con

traire et des grands vents qui y sont ordinairement. Nous ne passames outre les cinq lieuës d'où l'on voyoit aisément la terre de part en part laquelle commence là a s'eslargir. Mais d'autant que nous ne faisions autre chose qu'aller et venir selon le vent, nous tirasmes pour ceste raison vers la terre pour tascher de gaigner vn Cap qui est vers Su, qui estoit le plus loin et le plus auancé en mer que nous peussions descouvrir, et estoit distant de nous enuiron quinze lieuës: Mais estans proches de là trouuasmes que c'estoyent rochers, pierres et escueils, ce que nous n'auions encores point trouué aux lieux où nous auions esté au parauant vers le Su, depuis le Cap de S. Iean, et pour lors estoit la maree qui nous portoit contre le vent vers l'Ouest : De maniere que nauigans le long de ceste coste vne de nos barques heurta contre vn escueil et ne laissa de passer outre, mais il nous fallut tous sortir hors pour la mettre à la maree.

Comme ayans consulté ce qui estoit le plus expedient de faire, nous deliberasmes nostre retour, du Destroit de S. Pierre et du Cap de Tiennot.

AYANS nauigé le long de ceste coste environ deux heures, la maree suruint auec telle impetuosité qu'il ne nous fut iamais. possible de passer auec treze auirons outre la longueur d'vn iet de pierre. Si bien qu'il nous fallut quitter les barques et y laisser partie de nos gens pour la garde, et marcher terre par quelque dix ou douze hommes iusques à ce Cap, où nous trouuasmes que ceste terre commence là a s'abbaisser vers Surouest. Ce qu'ayans veu et estans retournez à nos barques, reuinsmes à nos Nauires qui estoyent ja à la velle qui pensoyent tousiours pouuoir passer outre: mais ils estoyent auallez à cause du vent de plus de quatre lieuës du lieu où nous les auions laissez, où estans arriuez fismes assembler tous les Capitaines, mariniers, maistres et compagnons pour auoir l'aduis et conseil de ce qui estoit le plus expedient

à faire. Mais apres qu'vn chacun eut parlé, l'on considera que les grands vents d'Est commençoyent a regner et devenir violens, et que le flot estoit si grand que nous ne faisions plus que raualler, et qu'il n'estoit possible pour lors de gaigner aucune chose mesmes que les tempestes commençoyent a s'eslever en ceste saison en la terre Neufue, que nous estions de lointain pays, et ne sçauions les hasards et dangers du retour, et pource qu'il estoit temps de se retirer, ou bien s'arrester là pour tout le reste de l'annee. Outre cela nous discourions en ceste sorte, que si vn changement de vens de Nord nous suprenoit qu'il ne seroit possible de partir. Lesquels aduis ouys et bien considerez nous firent entrer en deliberation certaine de nous en retourner. Et pource que le iour de la feste de S. Pierre, nous entrasmes en ce destroit, nous l'appellasmes à ceste occasion Destroit de S. Pierre, ou ayans ietté la sonde en plusieurs lieux, trouuasmes en aucuns cent cinquante brasses, aux autres cent, et pres de terre soixante auec bon fond. Depuis ce iour iusques au Mercredy nous

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