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paroles fe changeant en careffes & en tefmoignages de ioye de part & d'autre.

Si ces pauures Sauuages nous faifoient tout l'accueil poffible, faisans voir dans leurs yeux & leurs gestes les fentimens de leur cœur tout remply de tendreffe pour nous; nos actions correfpondoient à leur amour, en forte que dans tous ces témoignages de ioye & d'affection reciproque, nous beniffions Dieu de ce qu'il nous auoit conferuez parmy tant de peines, de dangers & de fatigues, & de ce qu'il nous auoit enfin conduit au bout de noftre pelerinage.

[47] C'eft la couftume de ces peuples d'entretenir durant vne partie de la nuict ceux qui les viennent vifiter, foit de complimens; foit de difcours affaisonnez des graces du païs, & pleins de gentilleffes à leur mode; foit enfin par des chanfons & des dances qui leur font ordinaires: mais nous voyant affez las de la fatigue d'vn fi long voyage, ils nous dirent qu'ils fe retireroient, de peur que leur ciuilité ne troublast noftre repos, auquel ils difoient vouloir concourir, en chantant à l'entour de nos cabanes les airs les plus doux, les plus agreables & les plus propres pour nous endormir.

Le lendemain matin douziéme de Iuillet nous chantâmes le Te Deum en action de graces de noftre heureuse arriuée, & prifmes poffeffion de tout ce pays. au nom de IESVS-CHRIST, le luy dediant & confacrant au fainct Sacrifice de la Meffe. Les Anciens nous firent en fuite quelques prefens pour nous feliciter de noftre arriuée & nous fouhaitter vn heureux eftablissement.

Le Dimanche fuiuant, qui eftoit le [48] feiziéme du mefme mois, nous accomplismes vn vœu que nous

all to seek shelter; the words changed into caresses and manifestations of joy on both sides.

If these poor Savages gave us the best possible welcome, showing in their eyes and gestures the sentiments of their hearts, which were full of tenderness for us,- our own actions responded to their love; and, in those manifestations of joy and mutual affection, we blessed God for having preserved us amid so many privations, dangers, and fatigues, and for having finally brought us safely to the end of our pilgrimage.

[47] It is the custom of these peoples to entertain during a portion of the night those who come to visit them,- either with compliments, or with speeches seasoned with the graces of the country, and full of polite sayings after their fashion; or, again, with their customary songs and dances. But, when they saw us so fatigued after so long a journey, they told us that they would withdraw, in order that their civilities might not disturb our rest,- to which they said that they wished to contribute, by singing around our cabins the softest and most agreeable airs, and those most capable of sending us to sleep.

On the morning of the following day, the twelfth of July, we chanted the Te Deum in thanksgiving for our happy arrival, and took possession of the whole country in the name of JESUS CHRIST,- dedicating and consecrating it to him at the holy Sacrifice of the Mass. The Elders afterward gave us some presents, to congratulate us upon our arrival and to wish us a propitious establishment.

On the following Sunday, which was the [48] sixteenth of the same month, we fulfilled a vow that we had made amid the dangers of our journey; we had

auions fait dãs les dangers de noftre voyage, promettant à Dieu de Communier tous enfemble, s'il nous donnoit la grace de nous voir tous dans le païs que nous cherchions: ayant obtenu cette faueur tous nos François receurent le pain facré en vne Meffe qui fut chantée fort folemnellement: Ce fut-là que nous depliâmes tous nos ornemens, qui feroient pauures en France, mais qui pafferent icy pour tres-magnifiques.

Le Lundy dix-feptiéme on commença à trauailler tout de bon à nous loger, & à faire vn bon Reduit pour les foldats: nous l'auons placé fur vne eminence qui commande fur le Lac & fur tous les endroits circonuoifins. Les fontaines d'eau douce y font en abondance, & en vn mot le lieu paroist aussi beau que commode & aduantageux. Pendant que les hommes de trauail font dans cette occupation, nostre Pere Superieur à qui Noftre Seigneur auoit rendu la fanté, s'en alla auec quinze de nos plus leftes foldats au Bourg d'Onnontaghé, [49] éloigné de cinq petites lieuës de noftre demeure. Le peuple eftant auerti de la venue des François, fortit en foule au deuant de nous. Eftant à vn quart de lieuë du Bourg, quelques Anciens nous prierent de faire alte & de prendre haleine, pour efcouter vne harangue gentille & toute pleine de complimens que nous fit vn Capitaine des plus confiderables du païs, lequel marchant enfuite deuant nous, nous fit paffer au trauers d'vn grand peuple qui s'eftoit rangé en haye des deux coftez. Nous le fuiuions doucement & en bel ordre fuiuis d'vn autre Capitaine, qui venoit apres nous pour empefcher que ce grãd monde ne nous ferrât de trop prés. Nos foldats firent à l'entrée de la Bourgade vne belle falue qui rauit tous les fpectateurs. Nous

promised God to receive Communion all together, if he granted us the grace that we might all see ourselves in the country for which we were bound. As we had obtained that favor, all our French received the sacred bread at a Mass that was most solemnly chanted. On that occasion, we displayed all our ornaments, which would be considered poor in France, but which were deemed very magnificent here.

On Monday, the seventeenth, we set to work in good earnest, to build lodgings for ourselves, and a good Redout for the soldiers, which we erected on an eminence commanding the Lake and all the surrounding places. There is an abundance of freshwater springs; and, in a word, the spot seems as beautiful as it is convenient and advantageous. While the workmen were so employed, our Father Superior, whom Our Lord had restored to health, went with fifteen of our best soldiers to the Village of Onnontaghé, [49] at a distance of five short leagues from our residence. The people, who had been notified of the coming of the French, came forth in crowds to meet us. At a quarter of a league from the Village, some Elders begged us to halt and take breath, in order to listen to a polite harangue, full of compliments, delivered to us by a Captain, one of the leading men of the country. He then walked before us, and led us through a great crowd formed in ranks on both sides. We marched behind him quietly, and in fine order, followed by another Captain,- who came after us, to prevent the great crowd from pressing too closely on us. At the entrance to the Village, our soldiers fired a fine salvo, which delighted all the spectators. We were conducted to the Cabin of one of the principal and most renowned Captains of the

fûmes conduits dans la Cabane de l'vn des plus notables & des plus fameux Capitaines du païs, où toutes chofes eftoient bien preparées pour nous receuoir à leur mode: on nous apportoit des fruicts de tous coftez, ce n'eftoient que feftins, & dix iours durant toute la pefche & la chaffe de cette bourgade fut [50] employée pour regaler les François; chaque famille nous voulant auoir à l'enuy. Quelques temps apres vne autre escoüade de François en bonne conche arriuant tambour battant, on ne vit iamais tant de visages épanoüis, il fembloit que les cœurs des Sauuages fortoient par leurs yeux, & ie ne croy pas qu'on puiffe conceuoir, fans l'auoir veu, les tefmoignages d'amour & de cordialité qu'ils nous donnoient. Si apres tout cela ils nous trahiffent & nous massacrēt, ie les accuferai non pas de diffimulation, mais de legereté & d'inconftance, qui peut changer en peu de temps l'amour & la confiance de ces Barbares en crainte, en haine & en perfidie: Adiouftez que les Demons cherchent toutes les occafions de nous perdre, & que fi les hommes perfecutent en plufieurs endroits les Iefuites, ces malheureux efprits aufquels ils declarent par tout la guerre, ne les épargneront pas.

Le foir de noftre entrée les deputés de quelques nations nous vindrent faluër, & pour monftrer l'eftime que les Onnontagheronnons faifoient d'Achiedafé, [51] c'est le nom du Pere fuperieur, ils voulurent par vn prefent que fa Natte fût le lieu des confeils & des affemblées, c'eft à dire le Palais où on deuoit traiter de toutes les affaires du païs. Les Onnontagheronnons nous firent auffi leurs prefens auec grande ciuilité.

Les Annieronnons ne pouuant fe difpenfer de la

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